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L’habitat fait le citoyen, un livre de Jean-Philippe Durgoin-Clément

samedi 8 juillet 2023, par synper

Le SYNPER s’est toujours intéressé au logement. Il est lié au bien-être du travailleur pour de multiples raisons, à commencer par la distance entre le domicile et le travail. Le trajet est si important que le législateur a fini par assimiler l’accident de trajet à un accident de travail. Mais il y a aujourd’hui d’autres considérations à prendre en compte dont la possibilité de bien travailler dans son logement en situation de télétravail.
Ce regard global, humaniste, est également celui que porte Jean-Philippe Dugoin-Clément dans son livre L’habitat fait le citoyen. Le logement, entre crise sociale et crise environnementale.

Bien évidemment nous avons lu ce livre au travers d’un regard francilien, pour la double raison que son auteur est un maire de Mennecy, dans l’Essonne, mais aussi le Vice President du conseil régional d’Île-de-France en charge du SDRIF-Environnemental et parce que l’Île-de-France est le lieu où le SYNPER a le plus œuvré pour défendre le logement social. « Il faut mathématiquement patienter dix ans environ pour espérer accéder au parc social, puisque seulement 10 à 15% des demandes obtiennent satisfaction chaque année. Je ne parle même pas de l’adéquation entre le grognement espéré et ce qui est proposé - en termes de superficie et de nombre de pièces pour accueillir l’ensemble du foyer ou d’emplacement pour être à proximité du lieu de travail, éviter de changer les enfants d’école, etc. » rappelle l’auteur. Le SYNPER s’était opposé à une utilisation bien contestable de la présidente socialiste de la commission logement au conseil régional d’île-de-France qui a été condamnée en première instance puis en seconde pour prise illégale d’intérêt pour avoir œuvrer pour se faire attribuer indûment un logement social. L’affaire concernant Madame Michèle Sabban est aujourd’hui en cassation.

Mais l’ouvrage traite du logement bien au-delà de l’Île-de-France et la préface de Jean-Louis Broloo le fait d’emblée comprendre. Ce qu’apprécie le SYNPER est que l’approche n’est pas dogmatique. Elle place l’individu, le foyer plus précisément, au centre des préoccupations tout en y intégrant les enjeux environnementaux. Mais, plus encore, l’ouvrage fourmille d’idées pratiques pour faire autrement et mieux. Par exemple, la réversibilité des espaces serait facilitée si la hauteur sous plafond ne décroissait pas. « Depuis soixante ans, les Français ont grandi de 7 centimètres, pourtant, dans le même temps, la hauteur sous plafond moyenne à baissé de 27 centimètres. » « Avec une hauteur sous plafond à 3 mètres, plutôt qu’à 2,20 mètres, on transforme la typologie du bâti, on améliore la cadre de vie et l’on favorise la réversibilité des espaces. C’est ce qui fait que les immeubles haussmanniens ont pu totalement se reconvertir entre du logement, de l’activité, du service, de l’hôtellerie. La légère augmentation énergétique liée au volume supérieur est aisément compensée par des normes plus exigeantes en isolation. »

Le SYNPER s’occupe régulièrement de personnes sans domicile fixe et connaît bien la différence entre la politique d’hébergement d’urgence et celle du logement social. Aussi, nous avons apprécié que le logement soit traité avec une vue d’ensemble, prenant en considération ces deux besoins. Ainsi l’auteur indique, notamment, « Je crois beaucoup au modèle des pensions de famille par exemple, qui est un sytème intermédiaire entre l’hébergement d’urgence et le logement social. C’est une solution qui fonctionne bien et commence à se développer. C’est particulièrement intéressant justement parce que cela facilite la fluidité, car on n’y reste en principe que quelques mois tout au plus. » Le problème de la rigidité des règles régissant le parc social n’est pas esquivé. « Comment, par exemple, inciter un couple de personnes âgées à quitter un T5 obtenu lorsque les enfants vivaient avec eux ? On leur proposera un T2, manifestement trop petit, car cela signifierait qu’ils devraient se séparer de nombreux meubles et n’auraient plus de pièce où acceuillir leurs enfants et petits-enfants. Un T3, pourtant un intermédiaire raisonnable, ne leur sera pas attribué, car, dans le logement social, seule compte la composition familiale à l’instant T de l’attribution. Plus absurde encore, s’ils occupent leur T5 depuis des décennies, le T2 proposé leur coûterait à peu près aussi cher que leur ancien logement, en raison de l’inflation des coûts de constructions du neuf. » Expliquer ces règles du jeu insatisfaisantes aux travailleurs est le quotidien de nos représentants.

Le paradoxe de la populaire suppression de la taxe d’habitation est qu’elle correspond à la suppression d’une incitation à la construction de logements pour les Maires. Et l’auteur examine des mesures faciles à mettre en place pour relancer la politique du logement. Notamment, il évoque la nécessité de sécuriser les propriétaires bailleurs. « L’État doit mettre en place un mécanisme de garantie universelle des loyers impayés en faveur des petits propriétaires pour rééquilibrer la balance. Ce que Airbnb et consorts sont capables de faire, l’État français, cinquième puissance mondiale, serait incapable de le faire pour permettre à ses citoyens de se loger ? Je n’ose le croire. »

C’est donc une lecture accessible, pas trop longue (141 pages), et surtout avec des idées concrètes à mettre en œuvre que nous vous recommandons vivement !

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